Parcours d’une femme de la terre
Mercredi 27 mai, pendant que se déroule la 11e distribution en temps de Covid19, je m’assois sur un banc du jardin pour écouter Clotilde. A la veille de souffler la bougie de la première année du Champ de la Baleine, j’avais envie de mieux connaître cette femme qui vient toutes les semaines du Beauvaisis en camionnette pour nous apporter les fruits de sa ferme. Svend est allé dans la semaine visiter l’exploitation agricole de Clotilde et a cueilli quelques beaux clichés qu’il partage avec nous.
Un parcours de vie est jalonné de dates : 2005, la plantation du verger ; 2008, les premières AMAP avec les pommes ; 2015 : mort du père pendant le congé parental que Clotilde a pris pour la petite troisième et reprise de l’activité à la ferme familiale ; 2019 : Clothilde est officiellement cheffe d’entreprise agricole et patronne de 5 à 8 salarié.e.s, selon les travaux des champs.
Mais cette ligne du temps cache une histoire de vie qui n’était pas écrite à l’avance : Clotilde a d’abord fait des études de tourisme et travaillé 10 ans dans une agence de voyage ; son père, un original tôt converti au bio, a failli engloutir la ferme dans sa passion dévorante pour les chevaux de courses.
Clotilde est alors repartie à zéro professionnellement et financièrement, elle s’est formée en 6 mois à distance pour obtenir le Brevet Professionnel des Responsables d’Entreprises Agricoles qui se fait en normalement en 2 ans à l’école. Ce diplôme lui permet de décrocher la DJA, l’intéressante dotation “jeune agriculteur“, une aide précieuse qu’elle utilise pour forer un puits et investir dans quelques machines. . Elle gagne peu à peu de nouvelles AMAP en Ile-de-France (6 aujourd’hui, trois voyages hebdomadaires en région parisienne) et elle continue de faire les marchés dans l’Oise. Elle transforme une partie de ses produits dans une conserverie agréée bio. Elle fait quotidiennement l’aller-retour pour retrouver ses trois enfants et son mari céréalier à 55 km de sa ferme. Quelquefois, il lui arrive de se reposer le dimanche.
Elle dirige deux entités : le bio-verger de Rieux et l’entreprise qui porte son nom, Clotilde Ghesquière, qui gère les parcelles encore en agriculture conventionnelle. Sa ferme est une mosaïque de terres héritées de la famille de sa mère et des grands-parents de son père : 10 hectares de verger, 4 de maraichage et le reste en plaine où elle alterne céréales et luzerne. Deux ou trois ans de luzerne en rotation sur des champs plantés en céréales et c’est l’assurance de se débarrasser des chardons sans aucun traitement chimique. La luzerne est vendue à un éleveur du coin, toujours du circuit court. Elle poursuit d’ailleurs la conversion de ses dernières parcelles “en conventionnel” : elle n’a connu que le bio mais elle n’a pas l’impression d’une grosse contrainte et elle ne voit pas ce qu’elle pourrait faire de mieux en conventionnel.
C’est son mari, céréalier, qui gère ses champs en plaine en complément des siens. Toute cette partie de la production de Clotilde part en coopérative, tandis que celle de son mari est vendue à une industrie agro-alimentaire qui produit des chips. S’il n’est pas en bio, le mari de Clotilde n’utilise pas de pesticides, ce qui lui vaut quelques regards étonnés de la part de voisins agriculteurs : c’est le choix d’une nourriture saine d’abord, mais aussi d’un certain pragmatisme, car les insecticides sont de moins en moins efficaces.
Clotilde n’est pas seulement une femme dans un milieu encore majoritairement masculin, elle en vaut trois ! Triple casquette en effet de maraichère, d’arboricultrice et de céréalière. Le champ de la Baleine est entre de bonnes mains.
Toutes les photographies ont été réalisées par © Svend Andersen
4 commentaires
Trotabas · 30 mai 2020 à 18 h 59 min
Super pour ces photos et travail de Clotilde et des son équipe ! Merci d’avoir fait ce poste .
Catherine Logette · 30 mai 2020 à 19 h 24 min
Quel parcours ! Et quel bonheur de profiter de ses plantations…
Belles photos Svend !
👏👏👏
Catherine Logette · 30 mai 2020 à 19 h 26 min
Mais Clotilde a un H ou pas… Je me le demande à chaque fois que j’écris son nom…
sandrine saule · 30 mai 2020 à 19 h 31 min
pas de HACHE : c’est écrit sur son contrat